
Êtes-vous actuellement en train de lire un article de la blogueuse la moins régulière du Koweït ? Je pense qu’on peut l’affirmer sans hésiter…
J’ai écrit un article il y a quelques jours, je l’ai laissé traîner et il n’est déjà plus d’actualité. Tout bouge rapidement, en période de crise, et c’est difficile de suivre.
Alors, voilà. On va juste discuter, entre amis. Vous raconter un peu où ça en est ici. Et comment j’ai décidé de ne plus me tenir au courant.
La situation
Ah ! comme il est ennuyeux de parler de la COVID-19. Ah ! comme il est difficile de parler d’autre chose quand rien ne se passe.
En France, ça se déconfine. Les Français peuvent sortir, les étudiants retourner à l’école, les restaurants ont ouvert. L’été et son insouciance sont visibles sur toutes les photos et vidéos.
Je suis contente pour mes proches. Jalouse, aussi. Au Koweït, nous avons loupé la meilleure saison de l’année. Aujourd’hui, 19 juin 2020, le Koweït a toujours un couvre feu. Et nous sommes contraints au confinement météorologique.
Nous avons traversé cette horreur de couvre feu total. 22h/24 à la maison, deux heures de libre par jour pour … marcher, tous au même endroit. Comme des zombies masqués. Bienvenue en enfer !
Aujourd’hui, le couvre feu est de 18h à 6h. Il fait déjà 32° à 6h et on monte à 46° dans la journée. Nous devons toujours prendre rendez-vous pour faire nos courses. Prise de température et masque obligatoires. Le gouvernement avait prévu un déconfinement en plusieurs phases et la phase 2 devait commencer dimanche.
Nous avons échoué.

Le couvre feu sera moins pire, de 19h à 5h mais… Toujours pas de restaurants, pas de magasins, pas de mall, rien. Sachez cependant que je vis dans un pays de génies et que les évènements ont repris ! Oui, oui, en pleine pandémie, on organise des dîners dans les voitures, sur les parkings ! Ah Ah, bravo les gars.
Certaines zones qui étaient en couvre feu total, en réalité barricadées type banlieue 13, vont rouvrir. Jleeb et Mahboula sont fermées depuis plus de 100 jours.
C’est fou, 100 jours.
Un tiers de l’année.
Psychologiquement
Je suis chanceuse. Plus de cent jours de confinement, mais comparée à d’autres, j’ai de la chance de pouvoir prendre ma voiture et rouler. J’ai conscience de ma chance, chaque jour. Je suis payée, j’ai un toit et je peux manger à ma faim.
Mais allez, soyons honnête : c’est difficile d’être seule entre mes murs. N’avoir nulle part où aller, rien à faire, personne à qui parler. C’est à ce moment là que je réalise à quel point le monde en France est important pour moi.
J’ai vu des gens prendre ce confinement et l’utiliser à des fins créatrices. J’aurais aimé. J’ai fait, d’ailleurs : j’ai enregistré des vidéos pour une potentielle chaîne youtube, je les ai montées mais jamais postées. J’ai écrit des articles dans ma tête. Sans oublier les nombreux podcasts !
Et puis, j’ai aussi lu énormément de livres, et puis joué à la console. Finalement, par rapport à mon dernier article sur la pandémie, rien n’a changé. J’ai tout fait et personne n’a rien vu !

Le sport a rapidement disparu de la routine mais je continue à me lever tôt et me coucher tôt. Je fais des siestes et j’ai pris du poids. Franchement, sans toute l’angoisse, j’aime bien être chez moi toute la journée. Si on pouvait sortir plus librement – et donc il n’y aurait pas eu de confinement – je crois que j’aurais vécu ma meilleure vie.
Du coup, apparemment, mon objectif de vie serait de vivre une vie tranquille chez moi. Y a-t-il quelqu’un prêt à me payer pour ça ? …
Et après ?
Eh bien, il n’y a pas vraiment d’après sur lequel s’appuyer. Je ne comprenais pas le plan de déconfinement en France mais apparemment, il a fonctionné. Je ne comprends pas celui du Koweït et j’espère qu’il fonctionnera.
J’apprends sérieusement à dire oui à ce qui est. J’apprends le lâcher-prise.
Nous sommes dans le flou. Depuis le 1er mars, on navigue à vue et ça commence à être difficile de suivre et d’accepter le manque de libertés. Ça me fait me poser mille et une questions : la santé plus importante que la liberté ? J’en viens à en douter.
Est-ce que l’aéroport sera ouvert avant septembre ? Est-ce que ceux qui ont décidé de quitter le Koweït seront là à la rentrée ? Enseignants comme élèves… Des milliers de questions sans réponse, c’est frustrant.
Angoissant, aussi.

Digitale detox
L’angoisse. C’est certainement le mot que je choisirais pour parler de tout ça, après. C’est fou, j’ai imaginé qu’il y aurait un monde d’après. En fait, je pense qu’on reprendra nos habitudes en pensant au pendant. Je ne crois pas au monde d’avant COVID et au monde d’après. Mais je crois juste au pendant.
Du coup, en réalisant ce que je considère être une triste constatation. En voyant surtout à quel point personne ne savait comment gérer le pendant, j’ai supprimé mon compte instagram. Oh ! Je suis sûre que je reviendrais mettre mes petites pattes sur ce réseau en septembre… Mais en attendant, je veux vivre mon pendant Covid loin de tout ça.
J’avais arrêté de suivre le compte Instagram du Ministère de la Santé et au final, tout le monde repartageait les chiffres… En y ajoutant leurs commentaires angoissés – et angoissants.
Ensuite, j’ai commencé à être jalouse des gens qui avaient leur famille avec eux. Et puis, j’ai été jalouse de ceux qui ne semblaient pas angoissés. S’en est suivie la jalousie envers les gens qui continuaient de créer, mais surtout de partager.
Qu’est-ce que ça montre sur nous quand on réalise que la seule chose que l’on veut, c’est s’enfermer loin de tout ça ?
Alors j’avoue : je ne sais pas ce qu’il se passe. Ni au Koweït, ni dans le monde. Je vis dans mon nouvel appartement – la prochaine fois on parlera de comment j’ai déménagé en plein couvre feu total – avec le chat et puis on regarde la mer.
C’est calme, c’est bleu, c’est infini. L’appartement est lumineux. Je me lève avec le soleil, marche tôt le matin et retourne chez moi. Je regarde le temps passer. Et c’est ça qui est fou ; le temps passe toujours, il suffit d’attendre. Ça passe, tout passe.
Mais… Combien de temps pour surmonter le choc ?